Le Gratuit Nord 716

Un salon de tatouage en province Nord ? C’est désormais chose faite. Depuis le début de la semaine, Teva Taumihau, 42 ans, tatoué de la tête aux pieds, a pris ses quartiers au village de Koné, à côté de l’église. Ce Calédonien d’origine tahitienne – «ma mère est SinoTahitienne et mon père est Tahitien Maori», découvre cet art vers l’âge de 14 ans. «Je me suis pris de passion pour le tatouage et ses significations, en suivant des bouquins et le travail de tatoueurs polynésiens. J’avais un don, par rapport à mes anciens», se souvient-il. Mais ce colosse, qui a longtemps joué au rugby, se professionnalise sur le tard, «après être parti en France». Né sur le Caillou, il s’envole «à 19 ans» pour la Métropole. «J’avais soif d’aventures», glisse celui dont le prénom signifie «voyageur» en tahitien. Technique ancestrale En France, Teva Taumihau travaille dans divers secteurs, notamment la sécurité ou le bâtiment, étant titulaire d’un CAP. «Et puis je suis parti à l’armée, au 2e RiMa du Mans pendant cinq ans», sans pour autant oublier sa première passion. «Après l’armée, je me suis concentré sur une formation dans la création d’entreprise et je me suis lancé dans le monde du tatau», raconte-t-il. Pour ses débuts professionnels, Teva Taumihau peut compter sur un de ses oncles. «C’était un tatoueur reconnu en Europe, qui était venu sur le Caillou il y a quelques années. Il m’a pris sous son aile pour étudier l’art ancestral du tatouage.» Le jeune tatoueur en herbe apprend ainsi la technique traditionnelle, à la baguette, tout en se familiarisant avec l’approche moderne, le dermographe. Conventions internationales «Avec mon oncle, je me suis amélioré et j’ai pu voyager en participant à des conventions internationales à Paris, à Berlin, à Barcelone et en Italie. J’ai aussi travaillé avec lui à Toulon et en Autriche.» De quoi assouvir ses désirs d’antipodes. Îlien dans l’âme, Teva, ouvre son premier salon en Corse, «vers la trentaine». Il reste un an et demi sur l’île de Beauté, avant de s’installer en Bretagne. Voguant de convention en convention et reconnu dans le style polynésien, il est invité un peu partout et rencontre des «stars» du milieu. Il gagne en expérience et son corps se couvre peu à peu de motifs. «J’ai fait moi-même quelques-uns des miens sur ma jambe et mon bras, à mes débuts ; Et j’ai de bons amis et des gens de ma famille qui ont aussi pu se manifester sur mon corps. Sur le visage, c’est l’œuvre de mes aïeuls, cela représente notre culture, mon rang, ma personnalité et mon identité en tant que tatoueur.» Vingt ans plus tard Celui qui, à travers les motifs qu’il inscrit sur les peaux, se décrit comme «un gardien de notre culture», est finalement rappelé sur le Caillou, plus de vingt ans après avoir décollé de La Tontouta. «Je suis revenu début 2021. J’avais une petite famille et deux fils en Europe, mais j’ai dû revenir d’urgence en Calédonie pour ma maman qui était malade. J’ai pu profiter d’elle pendant un mois et demi, et elle s’en est allée», glisse-t-il. Teva Taumihau retrouve alors une partie de sa famille, installée à Népoui. «J’ai décidé de rester, de m’occuper un peu de moi et puis j’ai rencontré quelqu’un de Koné donc je suis venu m’y installer. Quand j’ai appris qu’il n’y avait pas de tatoueur dans le Nord, je me suis décidé à me lancer.» Une fois les contraintes sanitaires levées, Téva, détenteur des qualifications nécessaires «en hygiène et salubrité», trouve un local. À Koné, ses clients peuvent, depuis lundi, découvrir une technique particulière, puisque Teva tatoue à main levée. «Je sais utiliser des calques mais ça n’est pas ma gamme. La main levée, c’est ancestral pour nous. Ça demande de l’expérience et une grande maîtrise de son art», détaille le grand gaillard, dont les années métropolitaines n’ont pas effacé l’accent des Îles. Celui qui invite les potentiels intéressés à «bien réfléchir», promet des «créations uniques», le polynésien en tête, mais aussi de tous styles. «Je m’enrichis de la personne pour lui créer ce qu’elle veut», dit-il dans un sourire. Waldemar de Laage Avec Teva Taumihau, l’art du tatouage polynésien s’invite à Koné Installé depuis plusieurs semaines à Koné, Teva Taumihau va prochainement ouvrir son salon de tatouage au village, une nouveauté dans la zone. Spécialisé dans le polynésien et très attaché à la dimension ancestrale de son art, il s’adapte à tous les styles. Teva Taumihau, 42 ans, a ouvert son salon au centre du village. ZOOM Photo Waldemar de Laage Page 10 - Le Gratuit Nord - Nl716 - Du 29 avril au 5 mai 2022

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